Regardez ma belle femme

Je ne sais pas si quiconque d’entre nous se rappelait son nom. Martin la nommait « Ma Belle Femme ». Ma Belle Femme fait ceci, Ma Belle Femme fait cela, regardez Ma Belle Femme. Nous regardions. Ma Belle Femme ne disait rien. Son visage exprimait étonnamment peu. Elle acceptait l’adoration, elle payait de sa liberté. C’était le prix.

Martin était petit et agréablement laid. Un mec sympa sans profondeur. Il ne suscitait pas beaucoup de doutes. Peut-être même qu’ils s’aimaient ou peut-être ce n’était qu’un jeu. Je ne savais pas où l’un finissait et l’autre commençait. Un vrai jeu, c’est exactement ça.

Chéri, tu m’as interrompu ! – a dit récemment Ma Belle Femme. Nous avons tous été étonnés et Martin a même demandé : Tu as dit quelque chose ? Jusqu’à ce moment-là, elle était fidèle à son rôle d’un meuble raffiné. Jusqu’à ce moment-là, ils réalisaient loyalement des nostalgies croisées de différentes générations et de différents sexes. On ne peut pas s’en priver juste comme ça, comme si de rien n’était.